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silenzio



Inscrit le: 26 Nov 2006
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MessagePosté le: 03/03/2008 à 08:13:22     Sujet du message: Répondre en citant

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Autant d’avis, frangés de numéros de téléphone à découper, épinglés en haut et à gauche, presque recouverte par la photo d’une « moto à vendre - état excellent, à peine douze mille kilomètres au compteur », une autre « chambre refaite. »
Attirée par la calligraphie raffinée, à l’encre violette, comme celle que nous retrouvions dans les cahiers d’écoliers de nos grands-parents, quelques phrases écrites sans doute à la plume sergent major.
Ce maigre morceau de papier éveilla aussitôt ma curiosité. Peu de gens, de nos jours, se donnent la peine de fournir, un tant soit peu, de classe à leurs mots, inscrits sur des rails imaginaires courant en droite ligne, comme respectant les tracés des portés de musique.

A LOUER

Appartement quarante cinq mètres carrés dans vieille ville ( Annecy).
Proche commodités, disponible de suite.
Conviendrait à une personne seule, ou couple sans enfant.
Animaux de compagnie à exclure.
Oiseaux en cage acceptés.
Contacter Madame Lavorel Antoinella entre huit heures du matin et huit heures du soir.
Rappelez ultérieurement en cas d’absence.
Signé: Illisible


Drôle d’annonce, polie et signée.
- J’aimerais bien connaître cette personne, dis-je à haute voix, attirant l’attention des clients.
Comment me suis-je retrouvée au sous-sol, près des lavabos, ma mémoire refuse de me l’expliquer : pourtant est-il, que je suis descendue ce soir-ci, munie de mon portefeuille et d’une lanière froissée de papier. Une sonnerie, puis deux… Je manquai lui raccrocher au nez, lorsqu’on me répondit :
- Bonsoir, Antoinella Lavorel, je vous écoute.
Une voix me vrillait les tympans, « tu es dingue, ma pauvre fille ! Vingt et une et des grosses poussières… » Et j’étais là, malgré tout au téléphone du restaurant, appelant une personne inconnue au bataillon, pour visiter, soi-disant, un appartement que je ne comptais pas louer, dans une ville où je ne résidais même pas.A suivre
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silenzio



Inscrit le: 26 Nov 2006
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MessagePosté le: 05/03/2008 à 08:03:16     Sujet du message: Répondre en citant

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- Heu… Désolée, madame, je sais qu’il se fait tard… Hmm, pardon… Je me présente, mademoiselle Wendy Malloy à l’appareil… Je vous appelle pour l’annonce…
- Je vous en prie, êtes vous intéressée ? , égrenai-je tout en me fustigeant.
- Oui, enfin je… J’envisage de m’installer dans la région et... Mais vous dérange peut-être, je peux vous appeler demain, proposai-je. Pourvu que je la dérange, priai-je en silence.
- Non, pas du tout. Nous pourrions fixer un rendez-vous pour visiter ?
- Heu, demain dans la matinée, si vous êtes disponible ?
- Aucun problème ! Dix heures, ça vous irait ? Ou bien un peu plus tard, si vous préférez…
- Non, dix heures, ce sera parfait, fis-je. Je m’occuperais des formalités avec la direction dans l’après-midi, ajoutai-je en aparté.
- Alors, nous disons dix heures devant l’église Saint Maurice, vous connaissez ?
- Hmm… Oui.. Oui, je trouverais !
- Dans ce cas, à demain. Nous discuterons du loyer éventuellement après votre visite.
- A demain, bonsoir et encore mille excuses. Me voilà bien embarquée, ris-je, après avoir raccroché.
En tout cas, d’après la voix : claire, mélodieuse, pleine d‘assurance, je m’étais fourvoyée sur la personne ayant écrit l’affichette.
Je la voyais institutrice rigide, de longue date à le retraite, chignon haut piqué retenant des cheveux, aux reflets bleuâtres. Et le timbre de sa voix m’indiquait, que j’avais affaire à une femme encore jeune.
Tout compte fait, je rendrais les chambres demain matin.
A suivre
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silenzio



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MessagePosté le: 06/03/2008 à 06:13:46     Sujet du message: Répondre en citant

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19

Neuf heures trente, terrasse du café Notre Dame, devant un crème fumant et deux croissants.
J’observais, sourire amusé aux lèvres, deux cygnes se disputant sur l’eau claire du Thiou les morceaux de pain, lancés par un gamin ayant visiblement pris de l’avance sur la fin de semaine.
Dix heures moins dix, en direction de l’église Saint Maurice et, sans un regard pour cet édifice sans grâce, massif, je me surpris à songer à Notre-Dame de Liesse.
Saint Maurice répondait, par son allure, au néo-classicisme de cette autre chapelle, toutes deux solennelles, moins les colonnades de la seconde lui donnant un air de temple greco-romain.
L’Italie était proche…
Je cherchai dans la foule, peu nombreuse, à identifier la propriétaire du timbre découvert la veille au téléphone.
- Mademoiselle Malloy... ?
A ce son de cloche, j’amorçai un volte-face : à deux pas, émergeant de l’église, une femme. Oui, c’était bien une dame âgée qui m’adressait la parole et m’interrogeait ainsi, à brûle-pourpoint.
Vrai aussi, que j’étais la seule à faire le pied de grue. Nul doute, il s’agissait de la bonne personne, même voix, même intonation.
Petite, sèche, habillée avec élégance, nonobstant sans prétention, d’un tailleur anthracite, d’une blouse blanche au col dentelé. Une œillade à ses chaussures montantes, assorties à l’ensemble, et agrémentées d’une boucle d‘argent.
Coiffée d’un chignon poivre et sel, dont une mèche rebelle, coquettement laissée en liberté, retombait devant ses yeux, elle ressemblait au portrait que j’en avais esquissé.
Ces yeux... A peine voilés par leurs des lunettes rondes, leur bleu délavé vous englobaient : ils vous saisissaient, vous fascinaient. Dans ces yeux là, on aurait pu aisément se noyer, et avec délices encore.
a suivre
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silenzio



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MessagePosté le: 07/03/2008 à 08:04:33     Sujet du message: Répondre en citant

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- Bonjour… Un sourire aimable, une main tendue, elle s’avança à pas mesurés, me salua à son tour.
Je me sentie sotte, bafouilla et la salua.
- Allons-y, c’est juste à coté, là-bas derrière la place. Me prenant par le bras, elle m’entraîna sur la chaussée. Bien plus facile pour marcher, à mon âge…, nota t-elle. Un soutien n’est pas inutile.
- Oui… Je souriais, serrant ce bras tendu.
- C’est au neuf, là… Entre le restaurant et l’antiquaire. Vous verrez, c’est très calme ! Ici, vous voyez…, tendant un index moqueur, le Monoprix. Par habitude, je l’appelle toujours Chez Fournier.
Elle papotait, tout en marchant et la mélodie de son timbre faisait chaud au cœur.
Une petite porte, dressée sur mètre quatre vingt, en bois massif orné de larges poinçons, coincée entre la devanture dévastée d’un restaurant, au nom illisible, et le rideau de fer, tiré à cette heure, du brocanteur Le Mazar, avec un M !
Pas de serrure, juste une imposante poignée en bronze, aux entailles couvertes de vert de gris, permettait d’ouvrir et de fermer ce... passage.


Car il s’agissait bien d’un passage, reliant la rue du Collège à celle de la Filaterie.


Un gué comme il en existe par dizaine, rejoignait sous les maisons accolées, les impasses, rues ou ruelles sillonnant le quartier.


Obscur chenal, étroit et bas de plafond, soutenu par des poutres plusieurs fois centenaires. Crépi des murailles partout écaillé, laissant à nu les pierres de construction : de pansus monolithes en granit, tout juste travaillés par un tailleur de longtemps disparu.
a suivre
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MessagePosté le: 08/03/2008 à 08:41:55     Sujet du message: Répondre en citant

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Trois autres ouvertures sur la droite, une courette à main gauche… Voyait-elle seulement le soleil ?
Certainement jamais…
Excavation rocheuse et de boiseries, où le végétal n’avait pas sa place.
Une ampoule nue, pendue au bout d’un fil, dénudé à sa base, éclairait chichement l’autre issue : 1675, un chiffre serti dans la pierre au-dessus du second accès, alléguait l’ancienneté de la construction.
C’est dans la serrure de celle-ci, que ma compagne glissa une clé d’une tournure inusitée. Le pêne renâcla un moment, protestant vigoureusement, tandis que la clenche refusa de bouger, pour céder subitement sans crier gare.
- Début du siècle la serrure, et toujours solide.
La clef qui rejoignit sa poche, aurait bien pu être celle du grenier de ma tante, où nous nous réfugions, les après-midi pluvieuses d’octobre. Ce rossignol, justement, tachait nos doigts de rouille, et exhalait une odeur sur : l’effluve particulier aux vieilles malles, où nous puisons par poignées des pièces anciennes, déposant dans nos paumes, et sur nos langues un goût cuivré, lorsque nous déjeunions sans un crochet préalable par les lavabos.
Pivotant sur l’huis, la lourde porte émit un râle lugubre, me remémorant ces ouvrages de nos auteurs favoris, dont nous dévorions les pages, sous la couverture, durant mon internat.
S’ouvrant vers l’intérieur, elle n’admettait libre passage que d’une seule personne de front, et encore, notai-je, n’aurait-il pas fallu que celle-ci fusse trop corpulente. Le chambranle aurait, en outre, obligé à se courber tout individu pour peu qu’il eut dépassé le mètre soixante quinze. Madame Lavorel me pria d’entrer la première, comme je jetai un regard alentour.
A suivre
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MessagePosté le: 09/03/2008 à 10:09:12     Sujet du message: Répondre en citant

Suite
Hagarde, avançant à tâtons dans la pénombre ambiante, une singulière sensation m’étreignit : une odeur âcre, comme la poussière charriée lors du ménage, me serra la gorge. La fraîcheur du lieu me saisit, une exhalaison proche de celle des celliers grand-maternels, vint me chatouiller les narines.
Ma main moite effleura l’enceinte, deux niveaux d’habitation : quels fléaux s’étaient répandus ici ? De quels drames, ce lieu avait-il été le théâtre ? De quels combats sanglants ?
Une volée de marches disjointes, monolithes polis par les milliers de chausses qui les foulèrent, ma semelle oscilla, et les lattes du parquet geignirent sous nos pas
Aucun fourbi dans cet insignifiant vestibule, une cheminée séculaire s’étalait au fond de la pièce, ne propageant nulle volute : l’électricité avait succédé au mélèze ou au pin.
L’escalier à vis, issu d’un donjon médiéval, répercuta l’écho de nos voix : une clameur ouatée comme dans les cours d’une nécropole, où l’on redoute de troubler le repos de pauvres hères.
N’avait-on pas ici calfeutré les meurtrières, à l’étoupe, et là, comble de luxe, ajouté une main courante, corde de chanvre, soutenue à espaces réguliers d’anneaux de bronze ?
Entrouvrant une porte contemporaine, tout de même en bois massif, remarquai-je, donnant accès direct sur le salon, il se révéla prolongé dans sa longueur d’une cuisine spacieuse et fort bien aménagée.
Malgré cela, la présente souillarde ne suggérerait-elle pas en fait, une vaste salle de banquet, où s’ébattaient trouvères ou troubadours, venus d’oc et d’oïl ? Ou n’était-ce qu’un délire ?
Quoiqu’il en soit, paupières closes, et en proie, à un tant soit peu d’imagination, je devinai presque le fumet appétissant des agapes d’antan, entendis le grésillement d’un ragoût sur le feu.
Tout s’amusait à me délivrer du présent.
Antoinella actionna l’interrupteur : trois ampoules, dépourvues d’abat-jour, torches-néons en lieu et place des flambeaux résineux ou enduits de goudron de jadis, éclairèrent chichement le couloir.
A suivre
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MessagePosté le: 10/03/2008 à 06:20:58     Sujet du message: Répondre en citant

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20

Ce que je vis, les volets une fois ouverts, laissant entrer la lumière du jour enfin revenue, ne fut que des plus communs : deux pièces, chacune pourvue d‘impostes, un intérieur meublé avec raffinement.
Et si les murs en pierres apparentes, donnaient l’impression d’un froid minéral, l’agencement et la qualité du vieux mobilier fleurant bon la cire d’abeille, procurait une touche de douillette chaleur.
- Au-dessus, ce sont les mêmes pièces, l’une, la première en chambre à coucher, et celle du fond en salle de bain, m’expliqua Antoinella.
Le présent me fouetta de plein front, et revenue avec mon interlocutrice, je m’étonnai de m’être octroyé ce prodigieux bon dans les siècles. L’intuition, aussi, d’avoir associé à la vie de nos ancêtres, une existence inconnue, et que je n’avais pu percevoir qu’en fermant mon cœur, à toute sollicitation extérieure, me quitta dans la minute.
- Vous irez les voir tout à l’heure, cette montée m’a épuisé….
Je n’eus aucun besoin de visiter l’étage, tant elle me le décrivit, avec ses gestes larges et ses yeux pensifs, perdue dans les dédales intemporels de sa génération.
Dans un état second, j’imaginai les lits bassinés de frais du palier, séduite par la comtoise dont les aiguilles se tenaient immobiles sur les cinq heures, d’un vingt-trois septembre.
Une fois les housses ôtées des meubles, les fauteuils d’un autre siècle rendus à leur usage normal, je discernai son engouement pour ce lieu, lui évoquant tant de choses.
Antoinella m’avait convoqué au tribunal du temps, m’a fait juge, juré et avocat de sa mémoire.
- Asseyons-nous un moment…, me proposa t-elle.
La phrase banale et passe-partout, qui condamne à écouter l’autre, à être spectateur de ses émotions.
A suivre
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MessagePosté le: 11/03/2008 à 08:54:45     Sujet du message: Répondre en citant

suite
Confortablement installées, assises face à l’une des fenêtres, le moment s’est prolongé et ce non sans déplaisir que j’en sus un peu plus sur la dame au téléphone.
Madame Lavorel avait fait, avec son défunt mari, l’acquisition de cet appartement aux lendemains de la guerre, les précédents propriétaires ayant pris un train pour l’Allemagne Nazie, un aller simple à ce qu’il parait.
Un aller simple, un train… Toutes les batailles, toutes les guerres sont a-priori semblables. D’inutiles et exécrables boucheries, à l’échelle locale ou étatique. Je sentis mon estomac se révulser, et une autre évocation me prendre au dépourvu. Cinquante kilomètres, d’un autre centre-ville…
D’oblongs appentis éthérés, des champs de barbelés battus par les vents septentrionaux, des douches en contre-bas. Une lapalissade, rien d’autre que des chambres mortuaires, qui au fil des jours, récoltèrent un autre nom. Pourquoi de conflits en campagnes, de batailles en anéantissements, nous n’avions pas justement réussi à absoudre les fautifs de naguère, à installer une paix, si précaire soit-elle ?
Non, bien entendu… ce serait par trop simpliste.
Cinquante kilomètres en contre-bas…
Struthof, sa vision n’a depuis lors, jamais consenti à me laisser en paix. Je fêtais mes dix-neuf ans, et n’avais pas bien compris. A cet âge, on pense pourvoir refaire le monde ; à cet âge, moi, je me suis demandé pour quelles raisons l’humanité sociale avait de la sorte évoluée ?
- Vous vous sentez bien ? , s’enquit Antoinella. Lut-elle sur mon visage, le combat intérieur qui s’y menait ?
- Hmm, hmm…, émis-je.
- Nombre de propriétés se sont donc trouvées vacantes à l’issue de l’Armistice..., souffla t-elle.
L’Armistice, une signature sur le papier en prévision de nouvelles belligérances.
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MessagePosté le: 12/03/2008 à 08:36:27     Sujet du message: Répondre en citant

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Cinquante années de bonheur partagé, un demi-siècle vécu à l’abri de ces pesantes murailles.
La chambre du bébé, à l’étage, aujourd’hui devenue salle de bains, de jamais occupée, faute de… sans doute de progéniture, et peut-être d’autre chose. A son grand regret, si ce n’était d’ailleurs le seul.
1995. Décès du mari, Hector, parti trop vite d’une maladie foudroyante, comme s’en gargarisent d’infâmes feuilles de chou. Regrets éternels, néanmoins l’éternité ne dure qu’une saison, épitaphe sur une stalle. Puis les années ayant fait leur travail de sape, les jambes n’ont pu indéfiniment affronter les marches usées de l‘escalier, l’arthrose a dévoré les mains, les rides amenuisés ce visage fier.
Achat finalement d’un petit studio de plain-pied, dans une résidence moderne, qui entama ses faibles économies. En dépit de quoi, madame Lavorel ne put, pour des raisons sentimentales, se résoudre à vendre le nid de ses amours.
Alors s’ensuivirent des locations, plus ou moins réussies, qui n’amoindrirent guère la joie de voir son ancien chez elle, toujours vivant, et disponible à nouveau, suite à la naissance de jumeaux chez les précédents locataires.
Voila la chronique se concluait d’elle-même, et il n’empêche, qu’après avoir visité l’autre niveau, également pourvu de quatre fenêtres se déployant sur le parc, je me sentis conquise par l’atmosphère des environs. J’avais croupi dans de sordides métropoles sans âme, niché ici ou là, dans des meublés sans davantage d'annales : ici tout était contradictoire.
Dommage que ce n’aie été qu’une boutade, faisant suite à ma curiosité. Un coup de tête, que je commençais à regretter.
Ce fut dans un drôle d’état d’esprit, ni vraiment groggy, ni mélancolique, que le samedi tard dans la soirée, je regagnai ma studette sans attrait. L’âme encore emplie de cet appartement, tellement envoûtant, la pensée tournée vers cette adorable vieille, pimpante malgré son age, vivante et heureuse d’être.
Je me saisis du carton, un bristol joliment décoré de sa main, et qu’elle m’avait tendu : y figuraient ses coordonnées, et je la revis me faire promettre de venir la voir, chaque fois que je séjournerais dans les parages.
- Même si vous ne comptez pas louer, cela me fera plaisir. A mon âge, vous savez, on se sent parfois bien seule… Vous verrez un jour…
J’étais partagée entre un sentiment d’adoration et de répulsion pour cette ville annecienne, et cet appartement, sorti en droite ligne d’une époque révolue.
Antoinella avait, soi-disant, une liqueur de framboise fait maison à vous faire tourner la tête rien qu’à en contempler la couleur.
a suivre
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MessagePosté le: 13/03/2008 à 08:25:54     Sujet du message: Répondre en citant

suite
21

La boucle était bouclée, la page décemment tournée, le livre sur l’étagère et l’alcool au rendez-vous, telle une vieille compagne. Ne m’étais-je pas persuadée que tout ceci n’était plus d’actualité, à l’heure où je pensais poser ici mes bagages ?
L’erreur sans doute se trouvait là, crevant les yeux.
Une framboise liquoreuse répondait quelque part à l’ambre d’un cognac, roulant et cognant contre les parois de nos verres-ballon.
Vingt ans de rayés en dix minutes… une nouvelle existence pouvait débuter, et Annecy semblait, du fond des nuits, me supplier de le rejoindre.
Seulement, avais-je omis que l’homme possède un don pour reproduire le schéma de ses pairs, et l’histoire… Mon dieu… L’histoire se répète sans cesse… à l’infini ! »

Ses doigts tambourinèrent sur la couverture. Naomi coula un regard stupéfait aux aiguilles de l’horloge : vingt-deux heures grelottaient sous le joug du carillon. Un autre, satisfait aux trente premières pages.
Habitée par le récit de ses aïeux, Naomi tint ses paupières closes une minute, sentant le vertige refluer, l’envahir et l’abandonner au bord de la nausée.
Des ombres frénétiques dansaient leur salsa diabolique : qui était finalement cette Wendy, née un soir brumeux, dont elle sentait surgir les affres sous plume ?
Ce visage sur lequel, elle n’osait apposer un nom, et dont elle ne parvenait d’ailleurs à esquisser l’image approximative, la torturait.
Un spectre roux rôdant délibérément, le long des réglures, et dont les yeux malins scrutaient son corps tendu et algique, reposé au rebord du fauteuil.
Un soupir vint gonfler sa poitrine, les paumes écrasées sur sa bouche, un son rauque émana de ses entrailles.
- Qui es-tu… ? , vint mourir sur ses lèvres entrouvertes.
Se faisant, elle débarrassa les reliefs de son repas, vida son cendrier, et se plongea à nouveau dans ce tumultueux récit.
Avant même d’en avoir conscience, elle voguait déjà vers ces eaux insalubres, happée par le rythme imposant du manuscrit : la mine crissait, couvrant d’une écriture syncopée le grain jauni du papier.
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MessagePosté le: 14/03/2008 à 09:45:53     Sujet du message: Répondre en citant

suite

Chapitre 2 :

1

Un jour morne s’insinuait entre les carreaux sales. L’enseigne au néon clignota, avant de s’éteindre, tandis que dans la pénombre les chiffres verts du réveil affichaient six heures vingt.

a suivre

très court épisode le temps de mettre en page le chapitre 2; Désolé pour les assidus (es).
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MessagePosté le: 15/03/2008 à 07:19:10     Sujet du message: Répondre en citant

Reprise pour du chapitre deux du roman inachevé de "WENDY"

2
Retour sur les lieux du crime. Je suis donc revenue de mon séjour d‘Annecy, découragée et prête à mordre à nouveau. Et les dix messages sur mon répondeur, ne présageaient sans doute rien de bon.

Ce n’était rien, en prévision de ce qui le lendemain, un lundi, allait me tomber sur le coin du nez.

Lundi dix sept juin, soleil sur toute la majeure de la France à l‘exemption de..., annonçait le préposé à la météo. Il avait sans doute oublié les orages loco-régionaux, qui allaient sévir sous l’enseigne de Fabien et Co.
Mes collègues, Marie-Laure surtout, m’ont accueillie avec une mine défaite, visiblement follement heureux de me revoir en un seul morceau.
A peine, ai-je eu le temps de déposer mon sac à main, que cette dernière me sautait dessus.
- Y’a eu du changement, pendant ton absence… C’est la merde ici… Je suis désolée.
Elle m’aurait annoncé la mort de Chirac, version deuil national, elle ne s’y serait pas mieux prise. Je n’ai pas eu à me poser la question bien longtemps, pour comprendre ce qui s’était déroulé dans mon dos. Et que je me souvienne, ma première réaction fut de rire aux éclats, à rameuter toute la boîte, en découvrant sur mon bureau, une enveloppe.
Elle avait été déposée, entre ma pâte de verre, souvenir d’Art Déco, et une pile de dossier, qui ne m’était plus destinée.
Oui, bien des choses avaient changé, depuis mon retour du Qatar.
Et j’entrevoyais mieux, à présent, les raisons pour lesquelles l’ont m’y avait dépêchée. Évidemment, les gens sont plus détendus et acceptent mieux le changement, au retour de vacances ou de séjours à l’étranger.
Ce couillon d’Harriot, quand j’y pense… Toujours aussi doué. Sonia m’a glissé à l’oreille, au passage, une petite phrase assassine :
- Ma pauvre chérie, tu as un courrier du patron… Je ne pouvais pas la souffrir celle-là, avec son air mielleux, et ses manières de cirer les pompes du chef. Le genre de nana, qui te lui arrosait les plantes, dix fois par jour, avec la nette certitude de monter rapidement en grade. La garce… Pas vraiment la main verte, mais sans conteste d’autres atouts.
Une autre ajouta, qu’il était toujours possible de saisir les prud’hommes. N’aurait plus manqué que ça… A suivre
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MessagePosté le: 16/03/2008 à 08:40:07     Sujet du message: Répondre en citant

suite
En somme donc, j’étais revenue pour apprendre mon congé, en bonne et due forme. Ce genre de bonnes nouvelles qui, le matin à jeun, vous plaque toujours un sourire aux lèvres. Vous n’avez plus votre place chez nous, et personne ne vous regrettera…
Chaque période de récession économique voyait, à l’instar du retour des grands migrateurs, celui d’une flopée de lettres cachetées envahir nos bureaux.
Harriot avait le sens du devoir, non celui de l’esthétisme et encore moins de la diplomatie. Encre noire, sur papier bai, à l’en-tête de Fabien et Co. , rédigée par sa secrétaire personnelle, sa plante verte comme nous l’avions surnommée entre nous. Celle-là, elle n’avait pas que l’oreille du patron…
Mes prédécesseurs, ceux dont les projets aujourd’hui envahissaient les archives du sous-sol, les photos, les cartons entreposés dans les coins ou le grenier à l’étage, devenaient eux aussi se souvenir, j’en suis quasiment certaine, de ce courrier.
Aujourd’hui, d’eux ne restaient le plus souvent qu’un nom sur une porte, que le peintre du coin avait oublié d’effacer. Certains envahissaient les ANPE du coin, d’autres les endroits où l’on était indifférent à leur embauche antérieure, sous l’enseigne de Fabien et Co.
Foutu courrier, à croire que Harriot en avait de pleines caisses dans son bureau, toujours une liasse de prête en prévision, un bon paquet coincé dans un tiroir, où il suffisait d’apposer le nom de l’intéressé au stylo rouge. Cela aussi était l’une de ses marottes…
Son papier, je lus en diagonale :
« Fabien et Co. Cabinet d’Architecte.
Madame, Monsieur,
Nous sommes au regret de vous faire savoir, que suite aux difficultés rencontrées, actuellement, par notre établissement… »
Sans doute, me dis-je, une nouvelle crise sociale, surgie de nulle part. Je fulminais.
« (…) et en tant que directeur, moi-même et mes collaborateurs, nous voyons au regret, de vous faire savoir par la présente, que vous ne faîtes plus à ce jour, partie de nos effectifs.
Veuillez agréer, etc. …
N. Harriot, signature et tampon de la direction. »
a suivre
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silenzio



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MessagePosté le: 17/03/2008 à 07:57:09     Sujet du message: Répondre en citant

suite
Lettre de licenciement en règle : vous êtes virée ! Le terme aurait été plus simple, et aurait économisé des fournitures de bureau à Harriot.
Surtout que, à l’en croire, la boite traversait une période tourmentée. Pure formalité administrative, d’ailleurs.
Dans la demi-heure qui suivit, je fis mes cartons et claquait la porte, sans néanmoins l’avoir copieusement insulté au passage.
Je me sentais mieux, libre mais malgré tout bien ennuyée. Ne me restaient que les indemnités du chômage.
C'est dans ce genre de situation que l'on recense se vrais amis. Dans l’entreprise, des collèges, des copains, sans plus. Pas un seul pour me soutenir, pas une pour m’encourager. Trop donné à mon travail pour avoir un cercle d’amis. Des sorties, des réceptions, partager un moment au seing de leur famille, un repas, une chambre, oui, de vrais amis : néant. Désert affectif, échec et mat.
Dans l’isolement total je passais les trois jours suivants à ruminer ma déchéance, à m’apitoyer sur mon sort, ne sachant ou me tourner pour trouver une bouée ou m’accrocher, un sourire, autre que compatissant à partager.
Bouger, tout claquer et repartir à zéro.
A suivre
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MessagePosté le: 18/03/2008 à 08:27:05     Sujet du message: Répondre en citant

suite
Comme mon mentor me manquait brutalement, cruellement. Daniel aurait su m’insuffler l’étincelle de courage, de détermination. Il aurait su trouver les mots justes pour m’indiquer la voie, il m’aurait épaulée, guidée.
Pourquoi penser à lui en ces moments de détresse? Comment s’en était sortie sa femme, ses enfants? Voilà longtemps que je n’avais de leurs nouvelles, occupée par mon travail, ma carrière, je les avais délaissées malgré ma dette envers l’époux, le père. Égoïsme angoissant de ma part que de penser à lui en termes de sauveur, de soutien alors que j’avais délaissée ceux que j’aurais pu, du soutenir dans la souffrance d’un deuil, d’une absence irrévocable.
Depuis quant ne m’étais-je pas intéressée à quelqu’un? Taber? Giesse? Oui Giesse m’aurait certainement aidée, soutenue, il m’aurait à coup sur trouvé une occupation, un emploi, même de courte durée.
« - Et merde, toujours à espérer un coup de pouce. Tu vas te prendre en main, et montrer à tous ces cons de quoi tu es capable, comment tu remontes à la surface. Sortir de l’abîme ou l’on t’as poussé et ou tu sembles te complaire. Efface tout et recommence » Dans la chambre livide, assise au pied du lit défait, aussi mal en point que ma mine tirée, cheveux ébouriffés, je me surprend à entendre cette voix qui ne sort pas de ma tête, mais de ma bouche. « -Voilà que je me met à parler toute seule. » Et c’est avec un sourire naissant, comme en écho au son de ma voix, que ces mots d’encouragement sortis de je ne sais quel subconscient, dictés par je ne sais quel amis inconnu, me font l’effet d’un ordre, d’une conduite à adopter, d’un but à atteindre.
Première nuit de vrai sommeil après mon licenciement. Des décisions à prendre, un combat à mener. Mon combat. Par moi, pour moi.
A suivre
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